Vera
Vera Drake est le dernier film de Mike Leigh, meilleur réalisateur aux British Academy Awards pour le fim, Lion d’or à Venise. Il traite d’un sujet encore remarquablement d’actualité (voir les fracassantes récentes déclarations de Jean-Paul II sur le sujet) : le droit à l’avortement. Le film se passe en 1949, en Angleterre, où l’avortement est illégal, sauf si la santé de la mère ou de l’enfant sont en danger.
Vera Drake est une vieille femme de 50 ans environ, vivant avec son mari (mécanicien), son fils, et sa fille. La journée elle est femme de ménage chez des particuliers, ou aide sa mère, seule chez elle. Le soir elle fait à manger pour sa famille ; mais parfois, en rentrant chez elle, elle aide des jeunes filles “à avoir de nouveau leurs rêgles”. Pourquoi Vera fait-elle ça ? On ne le saura jamais vraiment, mais on perçoit l’absolue nécessité que représente cette tâche pour elle ; elle ne vit pas dans la peur d’être arrêtée car sait qu’elle fait le bien.
Le film a de nombreuses forces : le personnage de Vera, l’actrice qui l’interprète magistralement (Imelda Staunton, meilleure actrice à Londres, Venise, Vancouver…, nominée aux Oscars), l’intéressante galerie de portraits que constitue sa famille, la qualité de la reconstitution… Malgré tout ça, je suis ressorti très frustré ; en effet le film est purement descriptif, et n’explique nullement les enjeux ; par moment on peut le qualifier “d’évident” : comment ne pas tomber sous le charme de Vera ? C’est bien sûr cohérent avec le milieu ouvrier peu éduqué dans lequel les personnages évoluent, mais peu satisfaisant pour le spectateur. Certes on apprend quelques choses (comment pratiquer un avortement avec un savon par exemple), mais rien sur, par exemple, l’abrogation de la loi. Le film est par ailleurs un peu répétitif, et un peu long (125min) : au bout du 5ème ou 6ème avortement la répétition s’installe. La 2ème partie du film (car Vera se fera finalement arrêter) est également assez linéaire et nous apprend peu de choses : le procès se déroule avec Vera comme spectatrice, un peu comme nous. Plutôt que de guider, on a l’impression que le réalisateur y assiste aussi.
Je ne suis donc pas spécialement enthousiasmé. Toutefois la prestation fantastique des acteurs peut justifier d’aller voir le film, que je qualifierai “d’insuffisamment politique”.